La vie ne tient qu’à un fil.
Je me le répète sans cesse.
Depuis que papy est parti rejoindre les cieux il y a plus d’un an (ou je ne sais quelle contrée, je ne saurais vraiment où il est jusqu’à ce que je le rejoigne), je me répète cette phrase sans cesse. La vie ne tient qu’à un fil et il faut en profiter, chaque jour, chaque heure, minute, seconde. Sans se soucier du lendemain, car on ne sait pas de quoi il sera fait.
Si pour certaines personnes la mort intervient à un moment de la vie où cela est presque « acceptable » ou « normal », comme pour papy au final, pour d’autres, c’est plus compliqué que ça.
Oui, parfois, on vous annonce que si l’on ne vous offre pas un rein la vie va se finir pour vous, d’ici quelques années, quelques mois, ou même quelques semaines. Je crois que l’on imagine même pas l’effet que cela peut faire sur la psychologie d’une personne, même d’une personne qui se pensait forte et capable de tout affronter. Sur une famille toute entière aussi.
C’est injuste parce que l’on se dit que nous ne sommes pas tous nés avec les mêmes chances dans cette vie.
Ca a tendance à me bouleverser quand je me mets à y penser.
La petite histoire d’aujourd’hui est belle, triste à la fois. Une fois de plus me direz-vous. C’est l’histoire d’une jeune femme, que nous appelerons J. pour conserver son anonymat, qui a accepté d’être contactée pour sauver des vies. Pour donner ses organes pour sauver.
Le don d’organe
La greffe ou transplantation devient nécessaire pour remplacer ou suppléer un organe défaillant, et permettre à un malade de retrouver une existence normale. On parle d’autogreffe quand l’organe provient du malade lui-même. Certains organes peuvent être prélevés de son vivant (notamment la moelle osseuse), la majorité des organes vitaux sont prélevés après la mort.
En clair, donner des organes sauvent des vies, OUI.
C’est lorsqu’elle a 18 ans que J. s’est inscrite sur la liste des donneurs potentiels de moelle osseuse.
Il en faut du cran non?
Moi à 18 ans je ne savais ni ce que je voulais faire de ma vie, ni ce que pouvait représenter le don d’organe. Et je crois même que j’étais incapable de prendre ce genre de décision. Si pour J. ca a été une évidence, il n’en aurait pas été de même pour tout le monde. Et je m’inclus clairement dans le « tout le monde »
Déjà parce que j’étais le genre de flipette à m’évanouir après une prise de sang. Oui, rien que ça.
J. n’a pas hésité elle, pas une seule seconde. Peut être parce qu’elle s’est sentie concernée par la cause plus que je n’aurais pu l’être à son âge. Parce qu’elle avait le recul suffisant, la maturité suffisante pour se dire que c’était important.
« Pendant mon adolescence, mon premier petit ami a dû être dialysé parce que ses reins ne fonctionnaient pas. Cela m’a sensibilisée aux questions de dons d’organes. Puis, au lycée, un intervenant est venu nous en parler et a aussi évoqué le don de moelle osseuse. »
Ceci explique peut être cela.
Quoiqu’il en soit, elle l’a fait. Sans hésitation, sans peur, sans crainte, sans se poser les questions que n’importe quel être humain de son âge se poserait.
Et serait susceptible de se poser légitimement.
Et moi je vous le dis, j’ai attendu 29 PUTAINS d’années pour me dire que peut être il serait temps de faire comme J, peut être que moi aussi un jour je pourrais éventuellement être appelé, pour offrir quelques années de plus à un être humain de plus sur cette Terre.
Et puis un jour, exactement sept ans après s’être inscrite, J. a reçu l’appel. Oui, l’appel qui te dit « pouvez-vous donner un organe, cette personne est malade et en a besoin et vous pouvez la sauver »
Je crois que j’hésiterais personnellement entre m’effondrer (de peur, d’angoisse, et de tout autre sentiment) et … m’effondrer. Mais non, J est restée campée sur ses positions avec fermeté, malgré son jeune âge, peut être par simple maturité.
J’ai dit merci, comme si c’était un cadeau qu’on me faisait à moi. J’ai assez mal vécu de ne pas pouvoir donner pour mon ami, qui a fini par être greffé cinq ans plus tard. Là, c’est comme si la boucle était bouclée
J. a sauvé une vie. C’est ce que je retiens de cette histoire (hormis son courage). Je ne sais pas comment tu peux te sentir à l’intérieur de toi, quand tu sors de 48 heures d’hospitalisation où tu dois sûrement te poser un milliards de questions…et que l’on vient sûrement te dire « grâce à toi, un être va pouvoir vivre, REVIVRE! »
Bon sang, elle a sauvé une vie.
Si ça ce n’est pas le plus merveilleux cadeau que l’on puisse faire.
Pour être un être humain comblé.
Car évidemment, nous sommes des êtres humains imparfaits, qui faisons des erreurs, qui parfois, nous laissons submerger par nos émotions, qui nous poussent à parfois faire des mauvais choix, mais lorsque tu peux « te racheter » de tout ça en offrant un nouveau souffle, une nouvelle vie, n’est ce pas là le plus beau des bonheurs?
J’aimerais qu’un jour, on m’appelle, moi aussi. Pour me dire que j’ai pu aider, être utile.
La société nous pousse à ne pas avoir toujours les bonnes valeurs, nous pousse à ne penser qu’à notre petite personne, à consommer toujours plus, dépenser toujours plus dans des futilités, nous plaindre sans cesse, être pessimiste et râler juste parce que le train est arrivé en retard ou que nous avons cassé notre téléviseur, alors qu’au fond, qu’est ce que ça peut bien faire? Et si les vraies valeurs c’était faire ce genre de gestes?
Je ne pense évidemment pas que l’on accepte de devenir donneur/donneuse pour recevoir quelque chose en retour, ou même pour se donner bonne conscience de quoique ce soit, si ce n’est de se dire que l’on a pu contribuer à sauver une vie, qui est le véritable cadeau. Quoi de mieux que de se lever tous les matins, en se disant que nous avons pu faire cela?
Et chaque matin, J. observe le cadeau que lui a offert l’agence de biomédecine, un sablier. Un symbole du temps qui passe, et qui, sûrement, doit lui faire penser à son geste chaque jour.
Comme le dit l’adage, ça remet les pendules à l’heure !
J.
Si vous souhaitez faire le même geste incroyable que notre intervenante pour cette quatrième histoire, inscrivez vous à la liste des donneurs et obtenez votre carte !
Pensez-y, vous pouvez sauver des vies !
Et elle me touche ton histoire !
Le don d’organe et moi, c’est encore quelque chose qui m’effraie beaucoup trop. Et je me sens lâche, misérable et incapable. Je suis incapable de donner mon sang sans avoir des envies de pleurer pour toujours et me rouler en boule dans un coin – est-ce d’ailleurs pour ça que je refuse de passer symboliquement la barre des 50kg, de peur de n’avoir plus « d’excuse » pour ne pas le faire ?
J’admire ton cheminement, tes réflexions, ton courage qui nait. Ton texte m’a bouleversé.
Hello Cléa
Je te remercie pour ton commentaire :)
Tu sais, moi aussi j’étais comme toi
Je dépassais pas les 50 kg non plus (et je crois qu’au fond ça m’arrangeait, bien secrètement, et égoistement)
Puis après j’ai écouté l’histoire de cette fille, et je me suis inscrite sans hésiter, avec elle, elle m’a ecouté, elle m’a donné des informations qui m’ont rassurée
Et je me suis dis que je ne pouvais pas faire autrement
Je pense qu’il faut se sentir prêt, ne pas se mettre la pression non plus, car ça ne sert à rien et une fois que tu es inscrite se dire que tu peux SAUVER quelqu’un.
On en a pas pleine conscience mais c’est vraiment ce qu’il faut retenir ;)
Mais tu n’as pas à te sentir lâche ni misérable, tu t’interroges et c’est déjà bien <3